Les comptes conjoints peuvent présenter des occasions d’atteindre vos objectifs successoraux et financiers généraux, mais ils peuvent aussi comporter des risques importants dont vous devez tenir compte. Nous présenterons ci-dessous quelques-unes des principales caractéristiques des comptes conjoints afin de vous aider à prendre une décision éclairée quant à savoir si ces comptes vous conviennent.

Propriété en common law et propriété véritable

Avant d’explorer les tenants et aboutissants des comptes conjoints, il est important de clarifier ce que nous entendons par « propriété ». Bien des gens ne réalisent pas que les actifs peuvent avoir des « propriétaires en common law » qui diffèrent des « propriétaires véritables » de ces actifs. Le simple fait que le nom d’une personne figure sur un compte ne signifie pas nécessairement qu’elle a le droit d’utiliser les placements qui s’y trouvent, d’en profiter ou d’en tirer un avantage personnel. Cette personne peut être un « propriétaire en common law », mais elle n’a pas d’intérêt bénéficiaire dans les actifs du compte.

Il est essentiel de comprendre cet aspect lorsque nous examinons les comptes conjoints. Il peut être utile d’envisager ce concept à l’aide d’un exemple plus connu, comme les fiducies. Dans le cas d’une fiducie, le fiduciaire (le propriétaire en common law) détient les actifs de la fiducie au profit des bénéficiaires (les propriétaires véritables). Le fiduciaire a le droit de signer des documents et de prendre des décisions concernant les biens, mais, à moins qu’il ne soit également bénéficiaire, il n’a pas le droit de les utiliser pour son propre bénéfice. De plus, même si le bénéficiaire d’une fiducie peut avoir le droit d’utiliser les actifs de la fiducie et d’en profiter, il se peut qu’il n’ait pas le droit de prendre de décisions les concernant ou de signer un contrat au nom de la fiducie. La distinction entre la propriété en common law et la propriété véritable est bien comprise en ce qui a trait aux fiducies. Malheureusement, de nombreuses personnes ne se rendent pas compte que ce concept de propriété en common law et de propriété véritable peut également s’appliquer à d’autres biens, comme des placements ou des biens immobiliers.

Lorsque des particuliers décident de créer un compte conjoint, il est essentiel que chaque propriétaire comprenne exactement la nature de cette relation.

Copropriétaire avec gain de survie

Dans le cas d’un compte conjoint avec droit de survie, chaque personne titulaire du compte est un propriétaire en common law. Les propriétaires peuvent exiger que les décisions soient prises à l’unanimité ou à la majorité, mais à moins d’indication contraire, chaque personne désignée aura généralement le pouvoir de donner des instructions ou d’effectuer des opérations dans le compte. Au décès d’un des tenants conjoints, la propriété en common law de celui-ci prend fin, et le ou les titulaires restants du compte continuent d’avoir l’autorisation légale d’effectuer des opérations relatives au compte. Cela signifie-t-il que le ou les titulaires survivants du compte deviennent également le propriétaire véritable des actifs du compte? Pas nécessairement.

Un droit bénéficiaire de survie existe généralement lorsque les copropriétaires sont des époux ou des conjoints de fait. Dans ce cas, lorsque l’un des propriétaires décède, le propriétaire survivant devient habituellement le seul propriétaire en common law et propriétaire véritable des actifs du compte, en vertu de la loi, sans que les actifs soient transmis à la succession du propriétaire décédé.

En revanche, lorsqu’un parent place ses actifs dans un compte conjoint avec un de ses enfants adultes, la loi suppose qu’il n’y a pas de droit bénéficiaire de survie. À moins que l’enfant adulte puisse prouver que le parent avait l’intention de lui léguer les actifs du compte à son décès, les actifs sont détenus en fiducie pour la succession du parent. Par conséquent, même si l’institution financière reconnaît l’enfant comme le propriétaire en common law du compte et lui transfère les fonds, l’enfant ne peut pas utiliser ces actifs à sa discrétion. Les actifs sont plutôt détenus par l’enfant en fiducie pour la succession du parent et doivent généralement être distribués conformément au testament du parent ou, s’il n’y a pas de testament, en vertu des règles de succession ab intestat de la province.

Possibilités

Éviter l’homologation (ou simplement la reporter?)
Le fait d’éviter le processus d’homologation et de réduire les frais connexes sur la valeur du compte constitue souvent l’un des principaux motifs pour lesquels on établit des comptes conjoints. Lorsqu’un droit bénéficiaire de survie est créé, les actifs détenus dans le compte sont généralement transférés au propriétaire survivant à l’extérieur de la succession du titulaire décédé. Comme, dans de nombreuses provinces, les frais d’homologation sont imputés à la juste valeur marchande des actifs transmis par l’entremise de la succession, un compte conjoint peut conduire à des économies d’impôt. Selon la valeur des actifs du compte, ces économies peuvent être importantes dans des provinces comme l’Ontario, la Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse, où les taux d’homologation sont relativement élevés.

Si aucun droit bénéficiaire de survie n’a été créé (par exemple, si un enfant adulte a été ajouté au compte uniquement à des fins de commodité), il n’est pas toujours clair que l’homologation puisse être évitée. Si l’homologation est nécessaire pour gérer d’autres actifs de la succession, selon les règles propres à votre province, un actif détenu en fiducie pour la succession par le titulaire survivant du compte pourrait devoir être inclus dans la valeur de la succession aux fins du calcul des frais d’homologation. Votre avocat peut vous informer des règles applicables dans votre province.

Vous devez toujours garder à l’esprit que les taux d’homologation sont beaucoup plus bas que les taux d’imposition du revenu. De plus, ils sont très loin d’être aussi élevés que les honoraires d’avocat et les frais judiciaires qui pourraient devoir être payés lorsque les intentions ne sont pas claires et qu’il s’ensuit un litige. Bien que la réduction des frais d’homologation puisse être un facteur pertinent à envisager lors de la planification successorale, il n’est généralement pas logique de chercher à obtenir une telle réduction au détriment d’autres objectifs plus importants en matière de planification successorale ou dans le cas où les stratégies nécessaires pour se prévaloir de cette réduction comportent des risques excessifs.

Risques potentiels

Les risques associés aux comptes conjoints peuvent être nombreux et doivent être examinés attentivement avec vos conseillers fiscaux et juridiques avant que vous ne décidiez d’ouvrir un compte conjoint. Voici quelques-uns des risques possibles :

  • Perte de contrôle : Lorsqu’une personne transforme un compte à propriétaire unique en un compte conjoint, elle perd le contrôle des actifs. L’autre titulaire peut maintenant faire des dépôts et des retraits dans le compte, peut-être à l’insu du titulaire initial ou sans son approbation.
  • Perte de certitude : Selon la façon dont la relation de compte conjoint avec droit de survie est établie, il peut être possible pour un titulaire de rompre cette relation et de créer plutôt une relation de tenants en commun. Cette mesure peut être prise unilatéralement, selon les directives d’un seul titulaire et sans le consentement de tous les titulaires. Lorsqu’une relation de tenants en commun est créée, le droit de survie n’existe plus et le cotitulaire peut laisser sa participation dans l’actif à une personne autre que le cotitulaire survivant.
  • Impôt sur le revenu : La création d’un compte conjoint à partir d’un compte à propriétaire unique peut avoir plusieurs conséquences fiscales. Par exemple, si un parent a ajouté un enfant adulte à titre de cotitulaire à son compte de placement, le parent peut être considéré comme ayant donné la moitié du compte à l’enfant adulte. Si tel est le cas, l’Agence du revenu du Canada appliquera des règles qui traiteront le transfert comme une vente de la moitié des placements dans le compte. Dans la mesure où la vente réputée donne lieu à un gain en capital, le parent serait assujetti à des impôts sur la valeur de ce gain. Dans le cas d’un compte conjoint codétenu par l’époux ou le conjoint de fait, l’impôt ne serait généralement pas exigible en raison des règles de transfert, mais des règles d’attribution du revenu pourraient être déclenchées, ce qui empêcherait le fractionnement du revenu avec l’époux ou le conjoint de fait qui a été ajouté à titre de cotitulaire. Certaines personnes croient à tort qu’en inscrivant le nom du conjoint comme propriétaire d’un compte, chacun des conjoints peut déclarer la moitié du revenu de ce compte dans sa déclaration de revenus. Bien que les règles soient complexes, la règle générale est la suivante : le revenu doit être déclaré proportionnellement à la cotisation de chaque personne.
  • Réclamations de créanciers : Lorsqu’un parent transfère un compte en propriété exclusive dans un compte conjoint avec un enfant adulte ou un autre membre de la famille, comme un petit-enfant, les actifs détenus dans le compte peuvent donner lieu à des réclamations de créanciers en ce qui a trait à ce membre de la famille. Ces réclamations peuvent comprendre des réclamations en vertu du droit familial relativement au partage des actifs si le mariage du membre de la famille prend fin par la suite.
  • Perte des protections juridiques en cas de rupture conjugale : Selon les lois de votre province et les modalités précises de tout contrat de cohabitation ou de mariage entre conjoints, certains actifs peuvent être protégés contre le partage en cas de rupture de la relation. Si ces actifs sont « regroupés » ou transférés à un compte conjoint dont le cotitulaire est le conjoint, ces protections juridiques peuvent être perdues.
  • Différends successoraux : Un problème courant dans les différends successoraux, y compris ceux qui aboutissent devant les tribunaux, est de savoir si un compte conjoint détenu par un parent et un enfant adulte est transféré à l’enfant survivant au décès du parent par droit de survie ou si l’enfant survivant détient les actifs de ce compte en fiducie pour la succession du parent. L’enfant adulte survivant, qui est titulaire du compte, peut être d’avis que les actifs du compte lui sont transmis par droit de survie, tandis que les autres enfants du parent décédé peuvent croire que les actifs du compte devraient être détenus par le titulaire survivant en fiducie et distribués en fonction du testament du parent décédé, surtout si le testament désigne tous les enfants comme bénéficiaires égaux. De tels litiges peuvent être incroyablement coûteux, tant sur le plan financier qu’en ce qui concerne la détérioration des relations familiales, et peuvent entraîner de longs retards dans l’administration de la succession. Ce risque de litige met en lumière l’importance de documenter clairement l’intention du parent au moment d’établir un compte conjoint.

Analyse avantages-coûts

Si vous envisagez de placer des actifs dans des comptes conjoints avec votre conjoint, vos enfants adultes ou d’autres membres de la famille, vous devriez consulter vos conseillers fiscaux et juridiques pour bien comprendre les occasions et les risques possibles liés à votre propre situation. Dans certains cas, les comptes conjoints peuvent constituer une planification successorale et une stratégie financière globale efficaces, mais ils comportent généralement des risques importants. Si les risques associés aux comptes conjoints l’emportent sur les avantages pour vous, envisagez d’explorer d’autres stratégies avec vos conseillers fiscaux et juridiques.

Communiquez avec votre conseiller en investissement Edward Jones pour vous assurer que votre stratégie vous permet de garder le cap sur vos objectifs financiers à long terme.

Renseignements importants :

1 La tenance conjointe n’est pas reconnue en vertu des lois de la province de Québec et, par conséquent, les comptes des clients résidents du Québec ne peuvent être détenus en tenance conjointe avec droit de survie.


Le présent article ne vise pas à fournir des conseils fiscaux ou juridiques. Les droits et responsabilités des propriétaires en common law et des propriétaires véritables sont complexes et peuvent varier selon que ces termes sont utilisés pour des questions de droit des biens, de droit fiscal, de droit des fiducies ou de droit familial. Le présent article vise uniquement à donner aux lecteurs un aperçu général de la complexité du processus. Les particuliers devraient consulter un conseiller fiscal ou juridique au sujet de leur propre situation.